Likrat est un projet destiné aux jeunes générations, au nombre desquelles j’espère pouvoir encore compter. Alors permettez que je nous plonge dans un univers qui nous parle à nous, les jeunes, et que d’aucuns auront peut-être oublié dans cette salle. Cet univers, c’est celui de la fête, qu’il s’agisse de la boom de nos jeunes années ou des soirées plus mûres. Dans ces salles, où l’on se retrouve et l’on danse, dans la joie, un objet est indispensable pour que la mayonnaise prenne. Suspendu au milieu de la pièce, c’est la boule à facettes. Die Diskoklugel. Cette boule composée d’une multitude de miroirs représente bien notre Suisse : un pays fait de multitudes de facettes. Réunies pour scintiller ensemble, cimentées autour d’un noyau commun. Un pays aux minorités multiples, qui tourne bien. C’est dans ce pays et à son image qu’est né le projet Likrat, dont j’ai l’honneur d’être marraine.
En hébreu, Likrat signifie « à la rencontre de ». Se rapprocher pour se connaître, se réunir pour se comprendre, voilà le sens de ce projet de dialogue interreligieux développé par la Fédération suisse des communautés israélites et soutenu par la Confédération.
« Le dialogue paraît en lui-même constituer une renonciation à l’agressivité », disait Lacan. On ne peut que regretter que l’ensemble des dirigeantes et dirigeants politiques autour de la planète ne fasse pas le pas du dialogue. Mais point de fatalisme. Nous, les jeunes, pouvons faire autrement. Nous devons faire mieux.
C’est pour cette raison que le projet Likrat s’adresse aux jeunes, car elles et ils représentent l’avenir. Ce projet prône le respect de l’autre, quels que soient son origine, sa religion, ses choix et ses aspirations. Depuis plus de dix ans, il a permis à plus de 20’000 élèves suisses du secondaire de rencontrer de jeunes Juives et Juifs qui se sont rendus dans les classes, avec le soutien de la Confédération. Ainsi, jour après jour, mot après mot, échange après échange, la tolérance et le respect se construisent à mesure que les stéréotypes s’effritent.
Ce que cette expérience apporte, c’est la compréhension que l’autre est lui aussi multiple. L’autre nous ressemble toujours autant qu’il est différent. Reprenons notre boule à facettes. Elle symbolise cette diversité qui tient ensemble. Mais en réalité, on peut aussi la voir comme l’image de ce que chacune et chacun de nous sommes : multiples. On ne peut être réduit à une seule facette de notre identité. Ces identités multiples nous rendent complexes et intéressants. Tout comme il est passionnant de les découvrir, à travers le dialogue.
De nombreux jeunes vivent l’expérience des préjugés et des stéréotypes, qu’ils soient juifs, musulmans, noirs, lesbiennes, gays, avec un arrière-plan migratoire, en situation de handicap. A chacune et à chacun d’eux, le projet Likrat donne de l’espoir. Il montre que le dialogue est la clé pour se rapprocher, se comprendre et s’accepter.
Pas étonnant dès lors que ce projet ait essaimé. En Allemagne, en Autriche, en Moldavie… et même en Suisse romande ! Après avoir essaimé, il pourrait même se dupliquer.
J’ai le plaisir d’annoncer aujourd’hui un film qui montre qu’il suffit de peu pour faire la peau aux préjugés. Mais ce peu, nous en avons beaucoup besoin. C’est ce qui rend le projet Likrat essentiel.
Le dialogue interreligieux est crucial. Ce soir, un Likratinos zurichois, entretemps devenu rabin, recevra le prix du dialogue, qu’il partagera avec un imam. C’est ainsi que la Suisse doit se profiler et s’exprimer vers l’extérieur : par des signaux forts en faveur de la paix.
Les Likratinos sont les ambassadeurs du dialogue, de la cohabitation, du vivre ensemble et du respect mutuel. C’est à ce titre que je les soutiens et m’engage en tant qu’ambassadrice de Likrat en Suisse romande.
Informations sur le projet Likrat: http://www.likrat.ch/
Allocution prononcée à l’occasion de la remise du Prix du dialogue des Juifs de Suisse
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