La Suisse a beau avoir ratifié de nombreux traités et accords, la situation actuelle comporte des lacunes considérables. Il ne s’agit pas seulement d’affirmer, mais aussi d’agir en conséquence, y compris en matière de financement par le biais d’investissements, ceci d’autant plus que la place financière suisse brasse des milliards de francs.
La Suisse a joué un rôle clé dans l’élaboration du traité sur le commerce des armes. Adopté par l’Assemblée générale des Nations Unis en décembre 2013, il a été ratifié par notre pays en janvier 2015. C’est le premier accord interdisant explicitement de livrer des armes dans les Etats dans lesquels il existe un risque qu’elles soient utilisées pour commettre de graves violations des droits humains ou des crimes de guerre. Toutefois, il ne touche pas la production et les investissements liés à l’armement. En outre, la pratique et la législation des pays signataires ne prennent encore que partiellement en compte l’esprit de ce traité, tandis que de nombreux pays ne l’ont pas encore ratifié, à l’instar des Etats-Unis.
A côté de ce document, il existe différents traités s’appliquant dans des domaines spécifiques, pour en réglementer, voire partiellement en interdire l’utilisation et la fabrication. Parmi ceux-ci, tout d’abord la convention sur les armes à sous-munitions, plus connue sous le nom des Accords d’Oslo. Elle interdit l’usage, le développement et la production d’armes à sous-munitions, représentant par conséquent une interdiction générale de ce type d’armement. Signée par 119 Etats, elle n’a malheureusement pas été adoptée par des pays impliqués dans des conflits ou jouant un rôle important, tels que la Chine, la Russie ou les Etats-Unis, ce qui constitue là encore une lacune préoccupante. Ensuite, la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’usage des armes chimiques et sur leur destruction, signée en 1993, regroupe 192 pays. Seuls l’Egypte, le Sud-Soudan et la Corée du Nord font encore défaut. Enfin, d’autres accords internationaux existent, sur les armes biologiques et les armes nucléaires, notamment.
Mais quel impact ont ces différents traités internationaux sur la législation suisse ?
La loi fédérale sur le matériel de guerre interdit le financement direct et indirect de matériels de guerre prohibés (art. 8b et 8c). Malgré ces dispositions, des financements indirects peuvent facilement être réalisés. En effet, l’alinéa 1 de l’article 8c comprend une restriction de la portée de l’article – « si le but visé est de contourner l’interdiction du financement direct ») – et le dol éventuel a été explicitement exclu des dispositions pénales (art. 35b al. 3 LFMG). Par conséquent, tant qu’il n’y a pas volonté de contourner le financement direct, le financement indirect n’est pas considéré comme une infraction. Il va sans dire que la preuve de cette volonté de contourner le financement direct est pratiquement impossible à établir pour les autorités pénales.
Aucune interdiction ne s’applique au financement du matériel de guerre conventionnel.
Chaque année, des milliards sont investis par la place financière suisse dans l’industrie du matériel de guerre, et cela tout en respectant la législation suisse, dont le laxisme a l’odeur du sang. Il est temps de mettre fin à ce commerce de la mort, qui alimente les conflits du monde entier et qui est entretenu par notre argent, via les caisses de pension et la banque nationale notamment. Prenons l’exemple de ces caisses de pension douées d’éthique, telle la caisse de pension de l’Etat de Genève, qui ont d’ores et déjà une exclusion relative à l’armement.
Lien vers l’initiative fédérale «Pour une interdiction du financement des producteurs de matériel de guerre».
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