Voici à quoi ressemble la réalité.
Fin de journée, vous cuisinez le repas du soir. Tandis que vous coupez vos légumes, un détective vous épie. Discrètement stationné devant votre immeuble, il vous photographie. Les photos continuent à travers la fenêtre de votre chambre quand vous allez vous coucher, jusqu’à ce que la fermeture des stores abatte l’obscurité sur son objectif. Le lendemain, grâce au GPS placé sur votre véhicule, le détective vous trace. Plus tard, assis à vos côtés un café à la main, il enregistre votre conversation dans un bistrot.
Le monde de Big Brother n’est plus un cauchemar littéraire, mais une réalité.
Si vous subissez un accident, devenez invalide, perdez votre travail ou dépendez d’une allocation pour impotent de l’AVS, vous courez le risque d’être exposé à une surveillance ordonnée par votre compagnie d’assurance.
On entre dans une nouvelle ère d’espionnage et d’intrusion massive dans la sphère privée, qui s’appuie sur de nouveaux moyens comme les drones et les traceurs GPS.
Une ère où les supposés « fraudeurs » aux assurances sont traqués avec plus de moyens que les criminels.
La loi adoptée par la majorité du parlement piétine le respect de la sphère privée et des libertés personnelles. Sans l’aval impartial d’un juge, qui garantirait que la mesure soit proportionnée et le soupçon fondé, le responsable d’unité de votre assurance pourrait « observer secrètement un assuré et, à cette fin, effectuer des enregistrements visuels et sonores » dans des lieux exposés au regard. Sur votre balcon, à travers la fenêtre de votre salon ou dans votre intimité la plus personnelle, à travers la fenêtre de votre chambre.
Avec son aval, il pourrait déployer drones et GPS pour vous pister. Les moyens des assurances pour détecter de supposés fraudeurs sont donc plus grands que ceux dont la police dispose pour poursuivre des criminels. Cette loi crée un précédent dangereux, car pour la première fois on porte une atteinte à la sphère privée plus lourdement que lors d’une procédure pénale dans un domaine spécifique de la vie.
Ce n’est plus l’Etat fouineur, mais un secteur économique qui devient fouineur, à qui on donne quasiment les pleins pouvoirs. Et ces surveillances sont effectuées non pas par la police, mais par de grosses boîtes de détectives privées, qui reçoivent leurs missions directement des compagnies d’assurances. La justice disparaît au profit de compagnies d’assurances et c’est l’Etat de droit qui en prend pour son grade.
Et nous sommes toutes et tous concernés.
Les observations peuvent s’étendre pour une durée qui peut être prolongée à l’envi par les assurances. Et si la surveillance devait être par la suite considérée comme illégale, il est probable que les preuves accumulées puissent tout de même être utilisées ! Là encore, on va plus loin que lors d’une procédure pénale.
Cette loi est une dérive d’un secteur économique particulièrement influent au parlement. Cela va trop loin, il faut dire stop et renvoyer sa copie au parlement, en votant non le 25 novembre.
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